Si la femme n’est pas encore l’avenir de l’homme (comme disait le poète) en cuisine, elle a été son glorieux passé !

Jugez plutôt, à l’heure où Edouard Nignon publie en 1933, « Eloges de la cuisine française », la mère Brazier fait partie de la première promotion de chef à obtenir 2 fois 3 étoiles au guide Michelin, Rue royale et col de la Luère. Celui de Lyon est aujourd’hui dirigé par le chef Mathieu Viannay, 2 étoiles, qui sert encore ses « plats » signatures. 

Cela fait d’elle la première femme à obtenir 3 étoiles au guide Michelin en même temps que Marie Bourgeois, suivie par Marguerite Bise en 1951 et Anne-Sophie Pic en 2007. Aujourd’hui, le chef Francis Fauvel « Aux Lyonnais » entretient le souvenir de la mère Bourgeois avec une tourte individuelle et son jus truffé, servie en plat principal, dont la farce, bardée, est constituée de noix de veau, de gorge de porc, de lard, lèches de volaille, foie gras et truffe hachée au cœur.

Un peu d’histoire ; Vous avez dit Mères Lyonnaises ? C’est un terme générique désignant un certain nombre de cuisinières d’origine modeste, installées à leur compte après avoir été au service des grandes familles lyonnaises, et proposant une restauration à la fois populaire et bourgeoise, simple et raffinée, basée sur un ensemble de spécialités devenues indissociables de la réputation gastronomique de la ville. Les premières mentions de « mères » remontent au XVIIIe siècle, avec le restaurant de la « mère Brigousse » au Charpennes, et la « mère Guy », installée à La Mulatière dès 1759.

Toutefois, l’âge d’or des « mères » se situe au XXe siècle, notamment pendant la période de l’entre-deux-guerres, qui consacre ce type de restaurant. D’une part, à cause des conditions économiques, qui motivent les cuisinières, qui n’ont d’autre ressource que de s’installer à leur compte. D’autre part, grâce au développement du tourisme automobile et des guides gastronomiques qui lui sont associé, dans un contexte de promotion des cuisines régionales. D’un chaland ouvrier et populaire à l’origine, réputation aidant, les plats proposés évoluent. Aussi les mères, devenues l’emblème de la cuisine lyonnaise, s’adaptent à une nouvelle clientèle composée de patrons et d’industriels venus rechercher une cuisine familiale de bonne facture. Les célèbres « Mères Lyonnaises » autre explication pour ceux qui en doutait que Lyon est bien la capitale mondiale de la gastronomie et non pas seulement du fait de l’affirmation de Curnonsky.

A côté des quenelles et des gratins de macaroni, les menus commencent alors à s’embourgeoiser. Si les premières « mères » étaient connues pour des plats à connotation fortement populaire, comme la matelote d’anguille (spécialité de la « mère Guy ») ou les « tétons de Vénus » (célèbres quenelles de la « mère Brigousse »), la « mère Filloux » fondera la réputation de son établissement du 73 rue Duquesne sur une volaille en demi-deuil et des fonds d’artichauts au foie gras.

Élisa Blanc, dite la « mère Blanc » (1883-1949), installée à Vonnas, dont le poulet de Bresse aux morilles et la côte de veau à l’oseille lui valent deux étoiles en 1933, aujourd’hui Georges Blanc est réputé pour faire saliver les clients du monde entier autour de son poulet à la crème.

Le XXe siècle compte ainsi une trentaine de « mères lyonnaises » dont la réputation dépasse largement les frontières. Parmi elles, il faut notamment citer la « mère Jean » la « mère Léa » la « mère Vittet », installée près de la gare de Perrache, la « mère Pompon », « la grande Marcelle », « la mère Charles ». A partir des année 70 et de la Nouvelle Cuisine, ce phénomène des « mères », a progressivement laissé place à des générations de chefs, cuisiniers dont certains ont été leur apprenti (tel Paul Bocuse, formé chez la « mère Brazier ») ou sont leur héritier comme George Blanc, petit-fils de la « mère Blanc », qui obtient la troisième étoile en 1981. Une des dernières grandes représentantes de ce type de cuisine, Paulette Castaing, installée à Condrieu de 1950 à 1988, doublement étoilée en 1964, dernière des « mères lyonnaises », s’est éteinte en 2014, à l’âge de 103 ans.

Pour parler d’«Elles » justement, célébrant la journée internationale des femmes, c’est bien durant cette journée que verra s’affronter en cuisine 12 femmes, 6 professionnelles et 6 amatrices lors d’un prestigieux concours dénommé « La Cuillère d’Or ». Un jury prestigieux composé d’hommes et de femmes qui cultivent l’excellence, pour la plupart officiant dans des cuisines ou dans des entreprises au service des professionnels des métiers de bouche.

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Ainsi le président du jury n’est autre que le President des Maîtres Cuisiniers de France, Christian Tetedoie, et Ilham Kadry, Vice-présidente de Sealed Air, déjà intervenante en janvier 2015 au World Cuisine Summit de Lyon en est la présidente d’honneur.

Si cette journée a été officialisée par les Nations Unies en 1977, Marie Sauce a démarré sa première édition en 2010. Revenant en force en 2016, le concours qui fera date se tiendra tous les deux ans.

Moyen mnémotechnique pour ceux qui ne veulent pas se tromper, une année le Bocuse d’Or, l’autre La Cuillère d’Or. La qualité du jury de La Cuillère d’Or n’a rien à envier au concours qui voit s’affronter depuis 1987 le gratin des chefs de la planète, n’ayant célébré qu’une femme depuis toutes ces années, Léa Linster en 1989. Ainsi, nous sommes très fiers de voir que Marie-Jo Leguen, Jacques Henrio et Frédéric Jaunault qui accompagnent nos actions en Roumanie de valorisation de la cuisine avec beaucoup de générosité sont parmi les membres de ce prestigieux jury. Quant à Guillaume Gomez, le chef de l’Elysée, il nous soutient comme Président de l’Association des Chefs de la République, est le seul chef à avoir signé notre toque « Collector » deux années de suite. Une première fois en 2014 pour l’Association, et en 2015 comme membre du très exclusif Club des Chefs des Chefs.

Ce 8 mars 2016, Journée de manifestations à travers le monde, la journée de la femme est l’occasion de faire un bilan sur la situation des femmes. Mais plus dynamique et faisant le pari de l’avenir, le concours est bel et bien un moyen de mettre à l’honneur ces femmes, ces mères, ces filles !

Thème du concours « la Gastronomie du XXIe siècle: traditions et évolutions » donne l’opportunité aux candidates de revisiter certains classiques et de créer ce qui pourrait être la cuisine de demain. La préparation de nos finalistes est longue et elles revoient leurs recettes, les testent, les retouchent… comme une œuvre d’art.

Pour Marie Sauce, la présidente de La Cuillère d’Or, la cuisine est un art, tous les métiers de bouche en sont un, que ce soit la boulangerie, la pâtisserie, la charcuterie, etc… C’est de la créativité. C’est également très personnel pour ces professionnels, ils y mettent leur personnalité, leur créativité, leur cœur. C’est un investissement humain colossal, ce sont des métiers d’amour alimentés par la passion. Et évidemment, la cuisine crée du lien social au sein même de la cuisine mais aussi autour d’une table, c’est le partage et la transmission à l’état pur. Ces métiers sont aussi synonymes de générosité.

Faisons les comptes : sur les 600 tables étoilées du guide MICHELIN France en 2016, 16 sont portées par des femmes.

Oui, cheffes !

Patrick-Pierre Pettenuzzo – Fête du Goût Roumanie.

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